Source : Libération

En cours ou à venir, plusieurs chantiers sensibles doivent être relancés rapidement par le nouveau ministre de l’Intérieur.

En claquant la porte, Gérard Collomb a laissé plusieurs dossiers brûlants en plan. Après un an et demi passé Place Beauvau, l’ancien ministre de l’Intérieur venait pourtant tout juste de s’attaquer à plusieurs chantiers d’ampleur. «Dans l’administration centrale, les dossiers n’avancent pas de la même manière selon le degré d’implication du ministre», a commenté un haut fonctionnaire du ministère. Le nouveau locataire devra donc reprendre et s’approprier au plus vite plusieurs mesures déjà lancées.

Vendue comme la grande réforme de sécurité publique du quinquennat, la création de la «police de sécurité du quotidien» a été évoquée pendant la présidentielle et ses grandes lignes esquissées. Pensé par le candidat Macron dans la continuité de la police de proximité mise en place par la gauche à la fin des années 90, le projet s’est déjà quelque peu étiolé. Comme un symbole, Collomb a fait part de son envie de quitter le ministère le jour où il lançait officiellement la réforme. L’un des premiers objectifs de la mesure était d’améliorer les relations entre la police et la population mais elle s’est surtout articulée autour d’annonces matérielles et comptables, sans véritable nouvelle doctrine. A titre d’exemple, l’organisation ultra-centralisée de l’institution n’a pas du tout été remise en cause. La conflictualité des contrôles d’identité n’a pas non plus été abordée. A cette réforme se greffe une montée en puissance des polices municipales et des agents de sécurité privée, provoquée par la menace terroriste. Le futur ministre sera donc chargé d’échafauder une bonne articulation entre les différentes missions des forces de sécurité intérieure.

Le successeur de Gérard Collomb devra également s’atteler à la problématique posée par les personnes emprisonnées pour des faits liés au terrorisme et susceptibles d’être bientôt libérées. «On estime que 65 % de ceux qui ont été condamnés depuis 2014 pour leur participation au jihad syro-irakien auront purgé leur peine d’ici à la fin 2020», précise le président du Centre d’analyse du terrorisme, Jean-Charles Brisard. Autre enjeu connexe, celui des détenus de droit commun radicalisés au cours de leur détention. Selon le ministère de la Justice, 450 d’entre eux seront libérés avant la fin de l’année 2019.

Egalement responsable des Cultes, le futur ministre doit hériter de l’organisation de «l’islam de France». En théorie. Car depuis quinze mois, le sujet a été repris en main par le chef de l’Etat et le calendrier n’a eu de cesse d’être repoussé : «premier semestre 2018»puis «automne», et puis plus de date. Hautement politique, le redécoupage de la carte électorale qui lui échoit nécessite lui aussi pas mal de doigté. Conséquence directe de la réduction du nombre de parlementaires voulue par Macron, cette réforme est pour l’instant à l’arrêt. Au Parlement, le ministre de l’Intérieur devra aussi défendre des mesures «d’allégement» de la procédure pénale dans le cadre du projet de loi sur la réforme de la justice. Une vieille revendication des organisations syndicales policières, qui se lancent au même moment dans de délicates élections professionnelles.