Source : Euronews
130 djihadistes français détenus dans le Rojava, le Kurdistan syrien, pourraient être rapatriés dans les prochaines semaines. C’est ce qu’a annoncé mardi le ministère des Affaires étrangères français.
Jusqu’ici, le gouvernement avait préféré laisser les djihadistes aux mains des forces kurdes, pour qu’ils soient jugés et qu’ils purgent leur peine sur place.
Ce changement radical de politique est dû a plusieurs facteurs, comme l’explique Gwendoline Idelon, analyste au Centre d’analyse du terrorisme :
« Ce changement de politique n’est pas surprenant. Il provient de deux facteurs principaux : la première raison, c’est l’incapacité des groupes armés, et par là j’entends les Kurdes de Syrie, à organiser la détention et le jugement des combattants étrangers. Ils manquent principalement de ressources : le Rojava dispose d’un système judiciaire qui est encore en formation, les institutions sont encore balbutiantes.
La seconde raison c’est évidement l’instabilité du contexte géopolitique dans la zone, suite à l’annonce par le président Trump du retrait des troupes américaines en décembre dernier, et à l’imminence d’une offensive turque consécutive. Le risque c’est que ces groupes armés soient dissous et qu’il en résulte une dispersion des combattants étrangers, notamment Français, dans la zone, et qu’on n’ait plus de contrôle sur ces combattants. Or la priorité de la France à l’heure actuelle, c’est que ces individus soient neutralisés durablement, qu’ils soient jugés et qu’ils soient punis pour ce qu’ils ont fait. »
– En cas de rapatriement, qu’est ce qui attendrait ces djihadistes, les combattants, leurs épouses et leurs enfants ?
« Ce qui va se passer, sur un plan tout à fait concret, quand ils vont rentrer, c’est qu’ils vont être interpellés. Ensuite, ils vont être placés en détention provisoire ou à défaut, sous contrôle judiciaire. Il faut surtout se souvenir qu’ils seront tous judiciarisés. Aujourd’hui, tous ces individus font l’objet d’un mandat d’arrêt, délivré par les autorités françaises, donc ils sont identifiés. On sait qui ils sont et on les attend pour les placer en détention provisoire.
Il y a une réelle nécessité de prise en charge de ces personnes, et d’un suivi accru concernant les enfants, parce qu’à force d’être au contact d’un univers tel sur la zone, ils peuvent devenir radicalisés. Il y a d’ores et déjà des dispositifs qui existent, je pense notamment à la Seine-Saint-Denis : ils sont pris au cas par cas et placés soit dans des familles d’accueil, soit ils sont gérés par les services sociaux à l’enfance. »
– Est-ce que l’on sait s’il reste des djihadistes français libres dans la zone irako-syrienne ?
« On estime à 1400 le nombre de djihadistes français partis au total sur zone, ce qui englobe la Syrie et l’Irak. A l’heure actuelle dans cette grande zone on dénombre 300 majeurs français, 200 disparus et 300 qui sont présumés morts. Donc si on fait le calcul, il y aurait environ 250 djihadistes français qui seraient dans la nature, c’est-à-dire qu’ils se retrancheraient dans les dernières poches de l’Etat islamique, principalement dans la province de Deir-Ezzor, le long de l’Euphrate. Et donc au Kurdistan syrien, il y en a 130 qui sont actuellement détenus et c’est pour ça qu’on a prévu leur retour, dans les prochaines semaines, sur le territoire français. »